RDDV : « Non je ne crois pas que ce soit en contradiction parce que la décision prise par le Premier ministre, l’arbitrage quil a rendu de demander un effort supplémentaire aux Français en disant : “ ceux qui travaillen,t je leur demande un jour de leur travail pour financer les mesures concernant la dépendance”… Henry LAURET : « Bonjour, Renaud DONNEDIEU DE VABRES .»
Renaud DONNEDIEU DE VABRES : « Bonjour .»
Henry LAURET : « Alors ce que lon nomme les altermondialistes qui veulent un autre modèle de développement, plus de respect de la planète, plus de justice sociale, une autre redistribution des richesses entre les pauvres et riches etc., cela font une double démonstration. Ils ont des idées simples, et ces idées prennent corps. Elles prennent corps jusquà gêner aux entournures les syndicats bien sûr, mais aussi les partis politiques comme les vôtres et on se demande comment vous vous situez, vous, aujourdhui à l’UMP, au gouvernement par rapport aux José BOVE et autres Bernard CASSEN qui sont très tendance. »
RDDV : « Non, non, nous, on nest pas gêné par le débat parce quil y a des questions qui se posent. La mondialisation cest une réalité. Elle a des aspects positifs parce que ce sont des échanges, cest de louverture desprit, cest des contacts, c’est parfois un développement qui progresse. Puis cest aussi des ruptures, c’est à dire que pour les gens, cest la délocalisation, la perte demploi, le gigantisme, luniformité et la destruction de nos identités et c’est Mac Do partout, ça cest clair, cest non ! Il y des convictions que nous partageons. »
HL : « Lesquelles ? »
RDDV : « Le fait quil faut trouver au niveau de la planète — parce que le genre humain est universel — des lieux pour créer des règles appropriées. Cela veut dire quoi ? Cela veut dire que sur le plan de la santé… »
HL : « Ce nest pas lOMC par exemple »
RDDV : « Justement cela peut-être l’OMC, cela nous différencie dailleurs des altermondialistes qui se sont bruyamment réjouis de léchec du sommet de Cancun. Nous, nous ne nous réjouissons pas, tout simplement parce quil faut quil y ait des lieux de régulation aussi bien pour les flux financiers et les échanges économiques que sur les questions de santé, sur les questions de protection de lenvironnement, leffet de serre qui concerne lensemble de la planète. Il nest pas localisé dans un espace du monde. Il y a donc effectivement la naissance dune opinion publique mondiale, et cest une bonne chose. On la vu au moment de lintervention américaine en Irak et des débats qui l’ont précédée.»
HL : « Vous pensez quil sagit de la même chose ? »
RDDV : « Oui, je pense quil faut quil y ait des lieux pour la régulation internationale. Que ces lieux aujourdhui sont récusés. »
HL : « Mais quelle régulation, Renaud DONNEDIEU DE VABRES ? Parce qu’en ce moment les mouvement alternatifs qui sont à Paris nont pas envie de votre régulation. »
RDDV : « Non ! Cest pour cela quil y a débat et cest pour cela dailleurs que nous avons sur notre propre terrain, nos propres idées à linstar du Président de la République qui est très attaché à léquilibre du développement entre le nord et le sud, les problèmes de santé, de respect de lenvironnement. »
HL : « Il en parle beaucoup. »
RDDV : « Cela nest pas quil parle, cest quil lance des idées et quil franchit des lignes jaunes. Quand on dit au fond qu’on ne récuse pas lidée dun prélèvement sur les flux financiers – non pas pour les dissuader, cela c’était l’idée de M. TOBIN ( la taxe TOBIN) qui na pas de sens – cest tout simplement de dire quil faut un financement du développement. Ça cest une idée juste ce. »
HL : « Cela veut dire encore un nouveau prélèvement, un nouvel impôt ? »
RDDV : « Non, non, ce n’est pas ça, cest s’il ny a pas un plus grand équilibre entre le Nord et Sud alors vous voyez bien quil y a des problèmes dimmigration qui se posent et les problèmes de la délocalisation de lemploi. Donc on a intérêt à ce quil y ait le plus d’ harmonie sociale possible, notamment à lintérieur de l’Europe. »
HL : « On en parlait déjà il y a 25 ans Renaud DONNEDIEU DE VABRES. »
RDDV : « A lintérieur de lEurope ? je pense que les forces syndicales classiques gardent toutes leurs prérogatives. Pourquoi ? Parce quil faut quil y ait un lieu de discussion pour cet espace social Européen. Et que les protagonistes, les responsables de cette discussion doivent être les organisations professionnelles et syndicales, les patrons, les salariés. »
HL : « Jusquà interveni,r comme le disait hier sur cette même antenne, Bernard THIBAULT dans le processus institutionnel qui se négocie en ce moment pour lEurope, la future Europe à 25.»
RDDV : « Vous savez, je crois quil faut que lon dise plus clairement au niveau européen, comme au niveau national qui fait quoi. Cest-à-dire quil y ait des domaines dans lesquels ce sont les partenaires sociaux qui sont compétents et des domaines dans lesquels c’est le législateur, le gouvernement, l’Etat ou les collectivités locales, le cas échéant. Il faut que lon sache donc exactement qui fait quoi. Moi, comme le gouvernement et comme cette majorité, je fais partie de ceux qui pensent queffectivement les partenaires sociaux doivent avoir un champ de travail pour qu’entreprise par entreprise, branche par branche et ce au niveau européen qu’ il puisse y avoir de nombreuses discussions. »
HL : « Alors au niveau français, ils se plaignent amèrement de ne pas avoir été consultés, par exemple pour cette fameuse dépendance des personnes âgées que le gouvernement au fond a décrétée sans autre forme de négociation, de dialogue. Est-ce que cela nest pas totalement en contravention avec lesprit du 14 juillet quand le Président de la République dit grosso modo : “on discute aujourdhui, on dialogue avant toute discussion” ? »
RDDV : « Non je ne crois pas que ce soit en contradiction parce que la décision prise par le Premier ministre, l’arbitrage quil a rendu de demander un effort supplémentaire aux Français en disant : “ ceux qui travaillent, je leur demande un jour de leur travail pour financer les mesures concernant la dépendance”. Et puis elles vont être organisées entreprise par entreprise. Vous savez bien ce qu’on a décidé, normalement cest le lundi de Pentecôte, mais il y aura une grande souplesse pour faire en sorte que entreprise par entreprise les discussions puissent avoir lieu. »
HL : « Franchement vous êtes convaincu par cette méthode ? »
RDDV : « Franchement oui ! »
HL : «Pas sur l’idée même, mais sur la méthode, sur la lisibilité de cette décision. »
RDDV : « Vous savez , il faut agir, il ne faut pas rester les bras croisés, les yeux fermés, les cœurs étriqués, et les esprits chagrins. Cest la pire des attitudes dans la France actuelle. Il y a des problèmes, les gens sont exaspérés de limpuissance publique. Si on ne règle pas un certain nombre durgences sociales ou économiques, eh bien les gens vont se désespérer, sexaspérer. Il y avait beaucoup de gens qui nous disaient au moment des dernières élections :“ vous savez, si vous nagissez pas c’est votre dernière chance” ! Et moi je me disais : mais la dernière chance avant quoi ? Eh bien la dernière chance avant lextrémisme, la rupture, le refus. Et donc, je souhaiterais aujourdhui, un peu plus de responsabilités de la part de certains élus politiques. »
HL : « A qui pensez-vous par exemple ? »
RDDV : « Je pense à la gauche. Ceux qui nont pas fait grand-chose jusquà présent »
HL : « Mais cest vous qui êtes aux affaires maintenant ! »
RDDV : « Mais ils pourraient, de temps en temps, considérer quil y a des causes dunion nationale. Laction en faveur des personnes dépendantes, quil sagisse des personnes très âgées ou des personnes handicapées, cest une cause qui doit rassembler toutes les forces politiques françaises parce quil ny a pas dalternative »
HL : « Il faudra en discuter avec eux ! »
RDDV : « On en discute avec la terre entière, on en discute au parlement, on en discute partout il y a eu une mission dinformation parlementaire, tout le monde travaille. Simplement, il y a un moment où il faut prendre la décision. Et là, cest pour la gauche, courage fuyons ! Nous ne sommes pas très nombreux ensuite à pouvoir le dire que le premier ministre a eu raison de le faire. Cest quelquun de courageux. Cest quelquun dhumain qui règle les questions. Nous avons réglé la question de la retraite, pas définitivement, mais enfin on a franchi une étape majeure. Il y a un plan pour la dépendance, nous avons le courage de demander aux Français tout simplement de retrousser leurs manches et dailleurs je parle à titre personnel, que ce jour-là on aille un peu plus loin. Cest-à-dire que ce jour consacré à la solidarité que dans les immeubles, dans les quartiers, les gens se tendent la main, que les gens se parlent un peu quils aillent le cas échéant franchir les portes des maisons de retraite.»
HL : « Mais ce nest pas de la politique ! »
RDDV : « Comment ça ce n’est pas de la politique, cest la politique nécessaire par lair du temps actuel. Nous sommes dans une période qui est tout sauf consensuelle. Nous sommes dans une période en fait qui est extraordinairement violente . Où vous avez des prémices daffrontements à caractère social, à caractère religieux, à caractère ethnique. Vous voyez bien que beaucoup de formes de racisme sont à l’œuvre. Nous sommes dans une période où tisser le lien nest pas facile. »
HL : « Vous jouez sur les réflexes de peur là. »
RDDV : « Non pas du tout, cest la réalité que nous voulons transformer et pour qu’elle se transforme, il faut que les gens acceptent de faire un geste, de retrousser leurs manches et de nous aider. Nous avons une troisième grande réforme à réussir. Une troisième grande garantie sociale à redonner aux Français : cest la santé . Et cest quelque chose dextraordinairement difficile. »
HL: « Cela vous fait peur politiquement, Renaud DONNEDIEU DE VABRES. »
RDDV : « Non, non, cela ne nous fait pas peur parce que nous, nous voulons être léquipe du résultat cela veut dire, que lon veut au terme des cinq ans, et quand jai dit au terme des cinq ans ce nest pas pour différer les questions qui se posent aujourdhui et que quand on dit çà les gens se disent : “ Vous voyez ils n’ont rien à foutre de nous parce quils ne se rendent pas compte que nous aujourdhui on a peur du chômage, on a des problèmes sociaux, on a un certain nombre de difficultés. » Parfois la durée est nécessaire. Donc, on veut tout simplement au terme des cinq ans que les Français aient le sentiment qu’il y a eu un changement. Et qu’un certain nombre de garanties nouvelles soient financées. Nous navons pas peur de dire que le travail est nécessaire. Que si chacun ne se remue pas, on n’y arrivera pas. »
HL : « Et les Français aiment bien leur RTT. »
RDDV : « Mais bien sûr, vous savez ce qu’ils préfèrent, cest passer un week-end à Venise gratis. Bien sûr ! Et je comprends, moi le premier. On est content d’avoir des loisirs, mais enfin on sait très bien que malheureusement les loisirs coûtent chers. Et qu’il faut financer tous ça. Si on veut un système collectif, un système juste, un système équitable, il faut mettre les choses sur la table de manière juste et équitable en n’étant pas des donneurs de leçons mais des gens courageux qui avançons. Cest notre état desprit. »
HL : « Mais est-ce que vous croyez, et pardon de vous couper, que la gouvernance – on a parlé de la méthode, je sais bien que vous ne voulez pas taper sur votre ami Monsieur RAFFARIN – était la bonne. En changeant le directeur de cabinet, a-t-il réglé les problèmes de ce pays. »
RDDV : « (…) Il a le droit dorganiser son équipe comme il l’entend. Je connais très bien Michel BOYON, cest une personnalité remarquable. Il a beaucoup de travail. Oui, on est dans une période difficile, parce quon demande des efforts aux gens. »
HL : « Le risque ce sont des extrêmes comme vous disiez tout à lheure. »
RDDV : « Bien sûr , cest la réforme ou lextrémisme. On est sincèrement préoccupé du coup de tonnerre que nous avons reçu le 21 avril 2002, plus dun Français sur deux faisant un bras dhonneur à la vie politique soit en sabstenant, soit en choisissant des extrêmes. Nous avons ça en permanence sur nos épaules, dans nos crânes, la réponse à cette demande du Président de la République et du Premier Ministre cest : laction , domaine par domaine. Ce nest pas facile car cest une vraie révolution culturelle. La gauche de M. JOSPIN avait répandu des illusions. Elle avait dit “ vous pouvez bosser moins et vous gagnerez autant ”, elle a façonné les esprits dans la torpeur, dans une sorte dillusions. Nous sommes obligés de remonter la pente, de dire aux gens ç’est moins facile mais cest pour régler des questions et pour offrir de nouvelles garanties. Mais aujourdhui lorsque lon parle de réforme les Français se disent : “mais quest-ce qui va encore nous piquer celui-là ”. Nous, nous répondons : “ oui on vous demande un effort supplémentaire mais cest pour une garantie nouvelle cest pour lemploi, cest pour la solidarité sociale”, et ça cest concret. »
HL : « Mais au fond, Renaud DONNEDIEU DE VABRES le vrai risque que vous courez vous, cest dêtre réélu puisque systématiquement les électeurs sortent les sortants. »
RDDV : « Si je disais : “ le ciel vous entende” vous me diriez : “cest une attaque à la laïcité que vous défendez”, donc je ne dis pas que le ciel vous entende mais je pense, queffectivement nous avons besoin de temps, de durée pour régler lensemble des questions qui sont posées. »
HL : « Merci Renaud DONNEDIEU DE VABRES, député dIndre-et-Loire et ancien ministre des affaires européennes. »