Réception à l’occasion de la session plénière de l’Assemblée des Français à l’étranger
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Mesdames et Messieurs les Conseillers,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
Je suis très heureux de vous accueillir au ministère de la Culture et de la
Communication à l’occasion de la sixième session de votre assemblée
réunie cette semaine à Paris. C’est, je crois, une première, qui témoigne de
l’importance que j’accorde à l’action internationale de ce ministère, qui s’est
considérablement développée depuis trois ans, mais aussi de mon
attachement pour ces Françaises et ces Français qui tentent la belle
aventure de l’expatriation, et partent à la découverte d’autres pays, pour
travailler, pour entreprendre, pour enseigner, pour créer, pour exporter
leurs talents, leur énergie, leur savoir-faire et les développer au contact de
ceux des pays proches ou lointains où ils s’établissent. Leur présence, leur
influence, leur rayonnement, sont considérables. Leur nombre, aussi.
Bien
qu’ils demeurent un groupe peu connu au sein de la communauté
nationale, ils sont environ deux millions deux cent mille, soit autant, par
exemple, que la population des Bouches-du-Rhône, ou que celle,
additionnée, des quatre départements d’Outre-Mer. Si la question de la
représentation politique des Français établis hors du territoire national s’est
posée, dès la convocation des états généraux de 1789, en changeant
l’appellation de l’ex Conseil supérieur des Français de l’étranger, en
Assemblée des Français de l’étranger, la loi du 9 août 2004 traduit une
véritable reconnaissance de la collectivité des Français établis hors de
France qui, malgré l’éloignement, ont tout autant que tous leurs
compatriotes, également le droit de participer à la vie nationale et de faire
entendre leur voix.
Vous êtes, parmi ces Françaises et ces Français, leurs élus, leurs porteparole,
leurs représentants. Vous défendez leurs droits et leurs intérêts.
Vous êtes leurs interlocuteurs privilégiés auprès du gouvernement, des
ambassades et des consulats sur toutes les questions relatives à
l’expatriation. Vous êtes étroitement reliés au dispositif d’action extérieure
de l’État, instrument très important de communication, d’information et de
persuasion auprès de nos partenaires étrangers, professionnels ou artistes,
membres d’institutions publiques ou issus de la société civile. Votre propre
voix est constamment relayée par les Sénateurs qui, aux termes de l’article
24 de la Constitution, forment la représentation parlementaire de nos
concitoyens établis à l’étranger. Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
vous jouez un rôle très important, non seulement de trait d’union entre les
pouvoirs publics et les expatriés, mais aussi de promoteurs actifs de la
présence française dans le monde et du rayonnement international de la
langue et de la culture françaises.
Mesdames et Messieurs les Conseillers, vous êtes tous les témoins et les
acteurs de la mondialisation en marche, aux avant-postes des évolutions et
des transformations du monde, vous êtes aussi au coeur de la défense des
enjeux essentiels de la coopération culturelle internationale, de la protection
des identités culturelles et du rayonnement de notre pays.
Je suis particulièrement heureux de vous accueillir au coeur de la Semaine
de la langue française, qui nous donne l’occasion de mieux faire connaître
la richesse et la vitalité de notre langue, à travers les mots migrateurs, en
partenariat avec une cinquantaine de villes de France, le ministère de
l’Éducation nationale, mais aussi les centres et instituts culturels français et
les alliances françaises à travers le monde.
Vous le savez, la mondialisation est un vrai défi pour les identités
culturelles. Dans le domaine de la création artistique, les mécanismes du
marché ne garantissent plus la pluralité de l’offre, loin s’en faut. C’est
pourquoi le ministère de la Culture et de la Communication s’est fortement
mobilisé pour défendre et faire adopter le projet de convention sur la
protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles.
Cette convention, adoptée par l’Unesco le 20 octobre 2005, à la quasi
unanimité de ses membres présents, entre en vigueur, dans quelques jours,
le 18 mars. Elle consacre le droit souverain des États à développer des
politiques culturelles. Il s’agit d’une étape capitale, historique, dans la
création d’un droit international de la culture, garant de la préservation de la
diversité des cultures, au même titre, par exemple, que le droit international
de l’environnement ou le droit international de la santé.
Cette exigence de la défense et de la promotion de la diversité culturelle,
nous l’avons portée et faite partager en Europe. L’Europe de la culture, ce
n’est pas l’Europe d’une culture uniforme, mais bien l’Europe de la diversité
culturelle. Dans une Europe élargie, réconciliée, mais qui doit faire face aux
doutes des opinions publiques vis-à-vis de ses institutions, seule la culture
peut aujourd’hui donner un sens, provoquer une émotion et entraîner
l’adhésion au projet politique européen.
A quelques jours du cinquantenaire du Traité de Rome, qui est une
commémoration nationale, que j’ai tenu à célébrer avec mes homologues
européens à Rome et à Athènes, je tiens à vous faire part de ma conviction
profonde, politique et personnelle, que l’avènement d’une véritable
citoyenneté européenne passe par la culture. Les propositions issues des
Rencontres pour l’Europe de la Culture, qui rassemblé, ici même, plusieurs
centaines de créateurs, d’artistes et de penseurs, venus de toute l’Europe,
formeront le socle de l’action de la présidence française de l’Union
européenne [en 2008] dans ce domaine, qui devra se traduire par des
avancées concrètes.
La création d’un label du patrimoine européen – idée française à laquelle se
sont ralliés rapidement et très largement nos partenaires européens – sera
un moyen de renforcer encore le sentiment d’appartenance des citoyens de
l’Europe à une identité et un espace culturels communs, en mettant en
valeur la dimension européenne de sites et de biens culturels, matériels
comme immatériels. J’apposerai la première plaque du label européen sur
l’Abbaye de Cluny lundi prochain, en présence des ministres de la Culture
grec et portugais.
La coopération bilatérale et l’organisation d’événements croisés sont aussi
des façons concrètes de faire vivre le dialogue interculturel. Le Ministère
s’appuie pour cela sur son vaste réseau d’opérateurs culturels, et
d’établissements publics, qui ont été fortement incités à s’impliquer dans la
coopération internationale, pour valoriser davantage leur savoir-faire, leur
expertise et leur prestige, et contribuer ainsi activement au rayonnement
culturel de notre pays.
Parmi les réalisations du ministère de la Culture et de la Communication,
permettez-moi d’en citer deux, dont la dimension dépasse le cadre
proprement culturel, et qui participent aux grands enjeux de politique
européenne et étrangère de notre pays, et dont, sans fausse modestie, je
crois que nous pouvons et que vous pouvez être fiers.
La France et les Émirats Arabes Unis ont décidé de créer, ensemble, un
musée universel, le Louvre Abou Dabi, destiné à favoriser le dialogue des
cultures entre l’Orient et l’Occident. Il présentera des oeuvres majeures
dans tous les domaines de l’histoire de l’art, et sera ouvert à toutes les
périodes, y compris l’art contemporain, et à toutes les aires géographiques.
Il fera appel pour cela aux techniques les plus innovantes en matière de
muséographie. Il répondra à tout moment aux critères de qualité, et à
l’ambition scientifique et muséographique du Musée du Louvre.
Il s’agit pour la France d’un projet collectif, permettant de valoriser son
expertise et son savoir-faire uniques au monde dans le domaine des
musées. Coordonné par le ministère de la Culture et de la Communication,
le projet associera les grands musées nationaux français et les musées de
France volontaires. Nous voulons réaliser, ensemble, un grand musée
français du XXIe siècle, qui puisse lui-même servir de référence scientifique
et culturelle aux institutions muséales du monde entier.
Je souhaite évoquer également les engagements pris par la France en
faveur de la reconstruction de la vie culturelle à La Nouvelle-Orléans, en
particulier dans les domaines des arts, de la musique et du patrimoine.
Après deux visites sur place, la première deux mois à peine après le
passage de l’ouragan Katrina, la seconde ce mois-ci, nous avons pu donner
toute la mesure de la solidarité culturelle de notre pays envers cette ville,
chère au coeur de tous les Français.
Vous le savez, je suis aussi le ministre de la Communication, autre volet
essentiel de l’action de l’État à l’international. Le 6 décembre dernier a été
lancée la nouvelle chaîne française d’information internationale, France 24.
Le monde entier, et en tout premier lieu les Français à l’étranger, peuvent
ainsi accéder au regard, au point de vue français sur l’actualité
internationale. Cette chaîne n’est pas un étage de plus dans l’audiovisuel
extérieur français, et je voudrais rendre hommage ici à TV5 et à RFI, qui
oeuvrent aussi de façon remarquable pour la défense du français et de la
francophonie. Elle a pour ambition d’apporter, non pas tant la voix de la
France, qu’un souffle et un esprit nouveaux, de nature à faire partager le
plus largement possible ce regard panoramique et pluriel qui considère
toutes les régions de la planète, avec le même intérêt et le même soin.
La France se trouve enfin dotée d’un instrument essentiel dont elle ne
disposait pas jusqu’ici.
En effet, en offrant une vision française de l’actualité du monde, qui enrichit
les points de vue et renforce les positions françaises, France 24 vient
compléter, sans la remettre en cause, l’offre des autres acteurs de
l’audiovisuel extérieur.
Je veux à cet égard rappeler que France 24 est fondée sur un concept
original qui n’empiète aucunement sur les missions des autres opérateurs
de l’audiovisuel extérieur.
Je dirais même mieux : France 24 a veillé à se construire de manière à être
complémentaire par rapport aux autres opérateurs de l’audiovisuel
extérieur. Ainsi, France 24 et TV5 Monde coopèrent étroitement pour
l’organisation de leur distribution afin de minimiser les coûts et d’accroître la
diffusion des deux chaînes.
De même, France 24 a conclu un partenariat avec l’Agence France Presse
et un accord cadre avec RFI.
Tout cela va donc dans le sens d’une meilleure cohérence et d’une
authentique complémentarité, chacun dans son rôle, entre les différents
acteurs de l’audiovisuel extérieur.
Je crois profondément que la culture, et la communication, sont au coeur
d’une véritable stratégie politique, destinée à répondre à la crise d’identité à
laquelle ni la France ni l’Europe n’échappent aujourd’hui, et qui explique
une partie des soubresauts du monde.
J’ai la conviction qu’avec la mondialisation, le rôle de notre réseau culturel
extérieur, que vous connaissez bien, se renouvellera entièrement. Il n’est
plus seulement de se mettre au service des artistes, des créateurs, des
professionnels de la culture et de l’audiovisuel. Il ne se limite pas davantage
à servir notre influence nationale, ce qui reste évidemment essentiel.
Mais il
est aussi de faire vivre la force du dialogue et du respect des identités et
des cultures, force dynamique et pacifique. Votre expérience, vos conseils
et votre action seront déterminantes pour faire de cette ambition au service
de notre action culturelle internationale et du rayonnement de la France,
une réussite.
Je vous remercie.