Alberto !
Te dire A Dieu, c’est tout d’abord te dire merci.
Merci, à l’ami, dont l’attention, l’humour, l’élégance et la générosité sont aujourd’hui une merveilleuse lumière, qui réchauffe nos cœurs meurtris et bouleversés.
Ta passion pour les belles choses n’avait aucune limite, tu aimais la faire partager ; j’osais parfois avouer mon ignorance ; avec une extrême gentillesse tu aimais transmettre, initier, donner le goût. Tu étais fier mais discret, un puits de science mais plein d’humilité. Un ami qui vous faisait gambader joyeusement dans un univers exceptionnel.
Je me souviens avec émotion d’un voyage récent au sein de ta sublime collection d’assiettes et de verres, quai d’Orsay ; tu étais heureux de montrer l’extrême diversité des origines de ces magnifiques objets de porcelaine , de cristal et de verre soufflé, et de prouver ainsi l’universalité de la beauté du travail de l’homme.
Tu étais profondément respectueux de toutes les cultures du monde, ouvert à chacune, passionné de découvertes. Tu recherchais en permanence les nouveaux horizons. Tu méprisais les intolérances et les intégrismes. Tu avais le cœur sur la main. Certes, les yeux toujours ouverts sur les réalités humaines, mais tu préférais les ignorer lorsqu’elles te semblaient trop médiocres.
Malgré la maladie et la souffrance, ton appétit gourmand de découvertes, de beauté, d’émerveillement est resté intact. Celui des premiers jours, de tes débuts, où, installé à New York après de brillante études à Paris d’histoire de l’art, tu étais producteur de reportages consacrés à l’architecture intérieure, avant de devenir le créateur mondialement demandé par toutes les personnalités les plus exigeantes à la recherche de l’excellence pour l’art de vivre, d’habiter, de voyager.
Aucun catalogue, aucune vente, aucun détail d’un projet, ne t’ont jamais échappé, même dans les moments où ton corps te faisait souffrir. Tu n’as jamais renoncé à être l’ami merveilleux, le maître vénéré. Le patron respecté parce qu’exigeant pour lui-même.
L’affection permanente et lumineuse de Linda et de tes proches s’est trouvée démultipliée par ton appétit de vivre. Tu nous as impressionnés jusqu’à la fin.
Te dire A Dieu, Alberto, c’est te dire Merci, à toi qui a été un grand Ambassadeur du talent français dans le monde entier, avec cette curiosité d’esprit, ce talent, ce souci des rencontres et des mixités culturelles et artistiques, qui ont fait de toi et du Studio Alberto Pinto un vrai symbole, un phare puissant et recherché. Une fierté pour notre pays, que tu en sois un porte drapeau aussi célèbre.
Le dialogue des cultures, des époques, des matières et des savoirs faire était pour toi comme un blason, un étendard revendiqué, une vraie conviction.
C’était aussi un héritage magnifique. Tu es un homme de la Méditerranée, du soleil, du dialogue inter-religieux. Un homme des 2 rives de cette Méditerranée que tu aimais, celle du sud grâce aux années de ton enfance passées avec ta famille notamment au Maroc, car déjà tu avais le goût du voyage, et celle de la rive nord, de la France, et de Saint Jean Cap Ferrat qui a été pour toi le berceau de ta première éclatante réussite comme décorateur travaillant pour une éminente personnalité américaine.
Un bel héritage, car je me souviens avec respect et admiration de l’allure princière de ton père, le jour où le Président Chirac t’a remis à l’Elysée la Légion d’Honneur. Il avait, comme Linda, ton élégance, ta prestance et l’infinie discrétion de ceux qui rayonnent naturellement d’une grandeur spirituelle et humaine, qui n’a pas besoin d’ostentation pour être puissante et reconnue.
Ton talent a eu de très nombreuses facettes.
Tu insufflais la vie dans chaque lieu que tu décorais. Le beau devait s’incarner, accueillir, générer un art de vivre, d’habiter. Le décor tendait la main, invitait à l’émerveillement mais aussi à l’ouverture à l’autre : autre époque, autre culture, autre tradition, autre manière de vivre.
Loin des standards éternellement reproduits, tu as été un vrai créateur, nouant un dialogue fécond avec les personnalités qui t’avaient choisi, et faisant à chaque fois un travail nouveau, unique : la haute couture absolue de la décoration, à l’image de l’exigence exceptionnelle d’Yves Saint-Laurent que tu admirais et aimais.
Ta personnalité foisonnante et généreuse se retrouve dans tes œuvres – car ce sont des œuvres à part entière – que tu as imaginées et réalisées pour de sublimes résidences, partout sur la planète.
Tu n’aimais pas les frontières, les cloisonnements, les frilosités et les replis identitaires qui te faisaient peur, toi qui parlais parfaitement un nombre incroyable de langues.
Passion, foisonnement créatif, amour du savoir-faire, des métiers d’art, exigence absolue du détail pour que le parfait soit une réalité vraie, telles étaient tes maximes personnelles et ton label prestigieux.
A cela s’ajoutait une dimension humaine et chaleureuse qui reflétait le merveilleux maître de maison que tu étais, et qui a accueilli chez lui en permanence beaucoup d’entre nous qui t’entourons aujourd’hui. L’art de la décoration s’enrichissait chez toi d’une dimension particulière, l’art de l’hospitalité, qui est celui de l’ouverture de l’esprit et du cœur, l’art de la vie dans son foisonnement, son tumulte et sa gaieté, l’art de la générosité.
Sur terre, en mer, dans les airs, ta griffe est devenue l’arc en ciel d’un talent magique et unique .
Il n’y a jamais eu de limite à ton travail acharné, à ta recherche permanente d’idées et d’objet nouveaux, à ton inlassable appétit d’excellence absolue.
Ce soleil que tu représentes ne s’éteindra pas. C’est le serment d’aujourd’hui, où nous te pleurons, mais où nous nous engageons pour toi.
Avec la flamme et le panache qui ont été les tiens et qui sont aujourd’hui un prestigieux flambeau, Linda, partenaire de ta réussite et de ta vie , qui incarne à son tour cette énergie flamboyante , et l’ensemble des créateurs et collaborateurs du Studio Alberto Pinto vont continuer cette route du beau, de l’excellence, de l’art. Leur réussite sera celle de ta passion qui est et restera présente.
Alberto, nous t’admirons. Albert nous t’aimons.